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La Coupe du Monde au Qatar, un événement à l’image des enjeux du XXIème siècle

L’idée d’un boycott de la 22ème édition de la Coupe du monde de football, organisée au Qatar en novembre par la FIFA (Fédération Internationale de Football Association) fait son chemin. Paris, Marseille, Bordeaux, Nancy, Reims, Nantes, Lille, Strasbourg… La liste des villes qui décident de ne pas installer d’écrans géants ni de « fan zones » pour diffuser l’événement s’allonge. Les entreprises doivent aussi se poser la question de cautionner ou non cet événement sportif international : publicité, sponsoring et toute forme de soutien sont d’ores et déjà scrutées.

Pourquoi ? Parce qu’il est difficile de cacher combien un événement peut être aussi calamiteux, tant en termes économiques qu’environnementaux. Alors, cette Coupe du Monde 2022, carton rouge ou simple avertissement ?

Économico-politique

Le coût de l’organisation de la Coupe du monde de football au Qatar, 220 milliards de dollars, est sans précédent. Il représente 100 fois le montant de celle organisée en France en 1998. Le Qatar et ses 2,75 millions d’habitants attendaient tout au moins 1,2 million de visiteurs pour cet événement. La FIFA compte en grande majorité sur les revenus liés à la vente de droits de télévision, de marketing, d’hospitalité et de licence liés à la Coupe du monde. Pour le Qatar, en novembre-décembre, les revenus issus des droits TV avoisineraient ainsi les 3,5 milliards de dollars. Un système d’équilibre financier jugé par beaucoup irresponsable au vu de la tournure des événements.

Contrairement à beaucoup de chantiers d’infrastructures, la Coupe du monde n’a même pas constitué un levier de création d’emplois pour la population du pays d’accueil. Le Qatar s’est appuyé pour les construire sur les travailleurs immigrés, qui représentent plus de 90% de sa population. Les infrastructures construites présentent le même type de lacune : elles ne s’implantent pas du tout dans la vie culturelle et sportive du pays.  Nous sommes en effet en droit de nous questionner sur l’avenir des 80 000 places du stade de Lusail une fois la compétition terminée, dans un pays sans culture footballistique tant en club qu’en sélection nationale… Sur les huit stades construits pour l’évènement, sept l’ont été spécifiquement pour la compétition et offrent une capacité de 40 000 à 80 000 places, au sein d’une agglomération de 800 000 habitants. Fallait-il vraiment construire une telle infrastructure, dans une ville qui n’existait même pas il y a encore quelques années ?

Les conditions d’attribution posent également question. Alors que les Etats-Unis étaient les grands favoris, le Qatar a créé la surprise en 2010, en obtenant la désignation comme pays hôte de la compétition, surpassant non seulement les Etats-Unis, mais aussi l’Australie et le Japon. Beaucoup se sont interrogés sur cette nomination surprise et des enquêtes judiciaires ont été ouvertes en Suisse, aux Etats-Unis et en France, même si aucune mise en examen n’a encore été prononcée.

Pourtant, et contrairement aux annonces de nombreuses grandes villes, aucune fédération sportive, aucun pouvoir politique n’a pris la décision de boycotter cette Coupe du monde. Le fait que le Qatar, dont le foot est un levier de soft-power majeur, soit un des principaux financeurs du foot français, mais aussi l’un des premiers exportateurs de gaz, n’y est pas pour rien, surtout en ces temps de transition énergétique douloureuse.

Environnement

Ce qui a frappé l’opinion publique, c’est que les sept stades construits spécifiquement pour la compétition, bien qu’à ciel ouvert, seront climatisés – sans compter les 168 vols quotidiens entre le Qatar et ses pays voisins, qui hébergeront une large partie des supporters. Mais il y a pire…

Le Qatar a essayé de se doter d’une image de leader de la lutte contre le réchauffement climatique et la FIFA y a contribué, avec par exemple des déclarations très volontaristes de Gianni Infantino, président de la FIFA lors de la COP 26 à Glasgow, en novembre 2021. Mais depuis, la légende a été éventée et à l’heure où le monde prône la sobriété, on assiste à un gaspillage immense d’argent et d’énergie. Le football populaire et solidaire a laissé place à un événement instrumentalisé et manipulé.

Conclusion

Puisque la FIFA refuse de remettre en cause son modèle fondé sur le profit ostentatoire, la démesure et le mépris des droits humains, seul le boycott populaire est capable d’imposer une remise en cause pour les prochains événements, afin que la Coupe du monde ne soit plus la Coupe de la honte.

La 22e édition de la Coupe du Monde a bel et bien vu le jour, et cela malgré les restrictions sociales et la mort de près d’un millier de travailleurs. Le football est un facteur d’unité autour du monde ; il a la lourde tâche de nous unir autour des valeurs que sont la fraternité et le sport. Si d’un point de vue sportif l’événement semble déjà rayonner à l’international après deux semaines de compétition, il ne faudra pas oublier et encore moins reproduire ou normaliser les pratiques mises en place par le gouvernement qatari durant près de 10 ans pour son organisation. Des pratiques qui constituent aujourd’hui sans appel une catastrophe à l’échelle planétaire. 

Le 20 novembre 2022 la Coupe du Monde de la FIFA débutait, un événement hors du temps aux conséquences sociales, environnementales et économiques graves. Le Qatar, au même titre que la FIFA, doit être tenu pour responsable de ce drame qui entachera pour toujours l’image de la compétition, du pays et du sport.

Issue de la Coupe du Monde

Au lendemain de cette coupe du monde 2022 qui a bouleversé le temps d’un mois nos journées et nos habitudes. Il est temps de faire le bilan. 

Sur un plan sportif, le spectacle a été au rendez-vous. Entre un Maroc porteur d’espoir, une Croatie à nouveau scintillante, une France éblouissante, c’est finalement l’Argentine du très grand Lionel Messi qui a raflé la mise. « La pulga » comme on l’appelle, est allé s’offrir son rêve le plus fou, gagner la coupe du monde.

Toutefois, comment ne pas revenir sur ce qui dépasse de très loin le simple cadre du rectangle vert. Entre boycott annoncé et audience record, il faut avouer qu’on a du mal à s’y retrouver. Peut-être pas autant que le Qatar, qui, avec un mois pour redorer son image en accueillant l’un des plus grands événements du monde dans le désert. Est peut-être ressorti comme le second vainqueur de la compétition? Mais il faut attendre encore une fois, c’est lorsque les reflets dorés de la Coupe du monde auront disparu que tout ce que le régime a pu mettre sous le tapis le temps d’un automne ressortira, que les choses pourront être jugées. Des stades climatisés, à l’interdiction de porter un brassard One Love ou encore l’indignation concernant les travailleurs morts sur les chantiers, la compétition a été sujette aux polémiques. Alors le Qatar vainqueur ou mauvais perdant, de notre côté c’est carton rouge et pour ça on a même pas besoin de la VAR…

Octave Coutant, Terminale

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