Paradoxe
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Les biais cognitifs : qu’est ce que c’est ?

Vous et moi sommes des primates. Nos ancêtres ont évolué dans des environnements difficiles où il fallait prendre des décisions rapides, entourés d’informations manquantes voire trompeuses. Quand on est un chasseur-cueilleur et que l’on a seulement quelques minutes pour prendre des centaines de décisions, il est très avantageux de faire des raccourcis qui sacrifient un peu de précision pour économiser du temps et de l’énergie. On appelle ces raccourcis mentaux des heuristiques. Quant aux erreurs qui en découlent, elles constituent une grande partie des biais cognitifs. Ces biais sont beaucoup plus pénibles quand on vit dans une mégapole et qu’on a des ressources illimitées pour faire des choix optimisés (comme pour Parcoursup, hum hum). D’autres biais viennent du fait que l’estime de soi est la clé du succès : on a toujours l’impression d’être le boss du game. L’objectif de cet article est d’explorer les biais cognitifs les plus spectaculaires, et d’en donner des exemples “immersifs”. Peut-être que vous pourriez vous séparer de quelques raccourcis mentaux qui empoisonnent votre cerveau ?

Les biais cognitifs sont souvent séparés en plusieurs catégories.

I) Les biais qui découlent d’un manque de sens

Situation 1

Mettons que vous voulez trouver la proportion de renards malades dans un bosquet. Vous menez une expérience : vous vous postez sur le bord d’un chemin et vous comptez les renards malades. Pourtant, vous risquez de n’observer que très peu de renards malades et de conclure que la maladie est rare. En effet, les renards malades sont trop faibles pour sortir de leur terrier. Vous êtes alors victime du biais du survivant, qui consiste à utiliser des échantillons non représentatifs, car une partie de la population est éliminée par avance. En l’occurrence, l’échantillon de renards que vous observez est biaisé, puisqu’il contient trop peu de renards malades.

Situation 2

5 novembre 2024. Le monde entier retient son souffle. Finalement, le résultat des élections présidentielles américaines finit par tomber : Donald Trump est le 47e président des Etats-Unis. Nous connaissons tous quelqu’un qui nous a dit “je le savais depuis le début”, “c’était sûr”… Cela peut s’apparenter au biais rétrospectif. Il s’agit de la tendance, après un événement imprévu, en tenant compte des informations en notre possession a posteriori, à considérer que les faits se sont passés comme ils devaient effectivement se dérouler, même si ce n’était pas notre opinion au début.

II) Les biais causés par un surplus d’information

Situation 1

Vous êtes malade, et vous décidez de rester vous reposer chez vous pour la journée. Pour passer le temps, enfoncé dans votre canapé, vous regardez un reportage sur le moustique tigre qui passe à la télévision. Il est porteur du virus de la dengue ? Ses premiers symptômes sont la fièvre, la fatigue, les maux de tête et nausées ? Et si vous l’aviez attrapé ? Même si vous êtes convaincu que vous êtes infecté par cette maladie, cela est peu probable. En revanche, vous êtes sûrement atteint du biais de disponibilité, qui est la tendance à surestimer la probabilité d’un événement, en se basant sur sa disponibilité dans votre mémoire.

Situation 2

Par ailleurs, vous connaissez sûrement le biais de cadre, qui est la tendance à agir différemment selon la manière dont une information ou une situation est présentée. Par exemple, si vous souhaitez acheter un pot de crème fraîche avec très peu de matières grasses, cela signifie que vous serez plus à même d’acheter le pot où il est écrit “95% sans matières grasses” que celui où il est écrit “5% de matières grasses”. 

Situation 3

Enfin, on dit souvent que le nombre d’or, la célèbre spirale qui lui est associée ou encore la suite de Fibonacci, se retrouvent dans la nature, l’art, les objets du quotidien… mais s’y trouvent-ils vraiment ? Sont-ils des choix délibérés des auteurs (en ce qui concerne les œuvres anthropiques) ou bien ne les voit-on que parce qu’on les cherche ? En effet, il est facile, en prenant deux mesures sur tout un monument, et en faisant leur rapport, de trouver des traits de ressemblance avec le nombre d’or. Mais était-ce une volonté de l’architecte ? Rien n’est moins sûr.

C’est le biais de confirmation.

III) Les biais provoqués par une trop grande confiance en soi

Situation 1

C’est avec un peu de mauvaise foi que vous sortez d’une interrogation de mathématiques ou d’histoire, en clamant haut et fort que le professeur exagère vraiment avec ses questions pièges et que vous avez tout raté. Quelques années plus tard, vous arrivez échevelés en réunion, avec une heure de retard. Votre excuse ? Le décalage horaire, bien sûr. Dans cette situation, vous souffrez du biais acteur-observateur, qui est la tendance à attribuer nos actions à des influences externes, et celles des autres à des influences internes. C’est-à-dire que si votre camarade a raté son interrogation d’anglais, c’est parce qu’il n’avait pas bien révisé, et pas à cause des questions pièges. Si votre ami s’est présenté en retard au rendez-vous que vous lui aviez fixé, c’est parce qu’il est désorganisé, et pas à cause du décalage horaire.

Situation 2

Vous êtes à votre arrêt de bus pour partir au lycée, et vous attendez déjà depuis vingt minutes. Vous êtes très en retard mais le bus n’arrive toujours pas ! De toute évidence, il y a un problème sur la ligne et il n’arrivera pas avant longtemps. Pourtant vous n’avez pas envie de partir à pied : et si le bus arrivait juste après votre départ ? Vous auriez attendu pour rien : ce serait un immense gâchis ! Vous êtes soumis au biais des coûts irrécupérables : une fois que vous avez investi des ressources dans un choix, vous préférez ne pas changer d’avis, même s’il existe une alternative objectivement meilleure.

Situation 3

Parfois, j’obtiens une bonne note en Histoire. Bien sûr, c’est grâce à mon talent et à mon travail acharné. Pour une fois que mes efforts donnent du fruit ! Hélas, la plupart du temps, je dois reconnaître que j’ai des mauvaises notes. Seulement, ce n’est pas ma faute : c’est complètement aberrant que ma professeure pose des questions aussi sournoises ! Que puis-je conclure ? Je suis simplement atteint par le biais d’auto-complaisance : je me juge responsable de mes succès, mais j’associe des causes extérieures à mes échecs.

IV) Les biais concernant le tri des informations à retenir

Situation 1 (la seule en fait...)

Vous êtes en coloc’ et vous alternez, un jour chacun, pour faire la vaisselle. Un jour, vous oubliez de remplir votre quota, et vous partez vous promener. Vous laissez votre coloc’ s’en occuper, mais franchement, vous ne gagnez pas tant de bonheur que ça en évitant la corvée. En revanche, quand c’est sur vous que retombe la vaisselle que votre coloc’ a oublié, vous sentez la moutarde vous monter au nez : c’est injuste ! Il s’agit du biais de négativité : les événements négatifs sont perçus avec au moins trois fois plus de force que les événements positifs.

Nous avons donc vu que de nombreux biais cognitifs peuvent influencer notre jugement, nos opinions. En les comprenant, et en ayant conscience, nous pouvons essayer de nous en détacher (pour ceux qui sont négatifs du moins), pour tenter de penser objectivement.

Timothée et Leeloo

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