En novembre 2022, l’entreprise américaine OpenAI proposait en accès libre un nouveau chatbot. Malgré de nombreuses erreurs, sa rapidité phénoménale, sa docilité exemplaire et la gratuité de son utilisation en ont fait un outil de choix pour les élèves… comme pour les professeurs. L’intelligence artificielle constitue ainsi une nouvelle manière de s’informer. Cependant, selon une récente étude de la BBC menée sur ChatGPT, Copilot, Gemini, et Perplexity, 20% des réponses sur l’actualité générées par ces chatbots contiennent des erreurs factuelles. Il n’est donc pas toujours judicieux d’avoir recours à l’IA pour s’informer. De nombreux élèves et professeurs de l’ENC l’utilisent néanmoins pour différentes requêtes… Explications !
Comment ça marche, ChatGPT ?
Avant d’évoquer la façon dont les élèves utilisent ce bot, expliquons son fonctionnement. Vous pensez déjà le savoir, mais essayez d’oublier vos idées reçues (vraiment, c’est important !).
GPT est un algorithme capable de produire du texte. Dans cette optique, nous lui proposons le début d’un texte, comme une conversation, avant de préciser notre requête. Il fait ça un peu comme nous, une lettre à la fois. Pour ça, il utilise des briques de base.
1. En mathématiques, nous avons étudié les fonctions. Ce sont des objets qui font correspondre un objet, souvent un nombre, à un autre.
2. On peut mettre plusieurs fonctions les unes à la suite des autres, ce qui nous donne une série d’étapes.

NB : le 4 et le 5 que l’on voit dans le schéma sont ce qu’on appelle des paramètres. GPT-3 en utilise plus de 175 milliards.
3. Il existe des fonctions qui font plutôt des opérations sur des suites de nombres. Elles aussi utilisent parfois des paramètres.

4. On peut transformer du texte en une suite de nombres, par exemple en attribuant à chaque lettre son numéro dans l’alphabet. Par exemple : TIM devient [20;9;13] et LEELOO devient [12;5;5;12;15;15].
A partir de toutes ces briques de base, on peut imaginer une fonction composée de nombreuses étapes simples, chacune imitant un neurone, qui reçoit une phrase et la complète comme un humain le ferait. Le défi consiste à organiser ces neurones comme un cerveau, et à choisir soigneusement les paramètres.
Mais comment trouver les “bons” paramètres, capables de deviner ce que dirait un humain ? Pour cela, il faut ce qu’on appelle l’étape d’entraînement.
Au départ, GPT a des paramètres aléatoires, qui produisent donc des résultats aléatoires. Alors on lui montre un très grand nombre de débuts de phrases et on lui demande de trouver la lettre suivante. A chaque fois qu’il se trompe, on ajuste ses paramètres, jusqu’à ce qu’il soit capable de produire les réponses désignées comme correctes. (Pour les intéressés, on appelle ça l’algorithme de descente du gradient).
Au passage, il se souvient des informations essentielles. Pendant l’entraînement, il les traduit en règles implicites dans ses nombreux paramètres, de la même manière que la grammaire ou l’orthographe.
Petit exemple : mettons que la base de données d’entraînement de GPT contienne les trois phrases suivantes :
- “La Terre est bleue.”
- “De quelle couleur est la Terre ? Elle est bleue.”
- “Mars est rouge.”
Si maintenant on lui écrit “De quelle couleur est Mars ?”, GPT devrait compléter avec “Elle est rouge.” Pourtant, ce n’est pas exactement écrit dans ses données, et d’ailleurs, il ne l’a jamais appris par cœur. Il suit seulement la structure qu’il a observé dans les phrases qu’on lui a donné.
C’est ça, le principe de GPT : pour répondre à vos questions, il prédit la suite logique de la conversation, mais il n’apprend pas par cœur.
Par ailleurs, il faut savoir qu’il utilise une part d’aléatoire dans ses prédictions : il ne donne pas toujours la même réponse à la même question.
Qui utilise l’IA, et comment ?
Il est temps de s’intéresser à votre utilisation de l’IA ! Attention, quand on parle d’IA, on ne parle pas seulement de ChatGPT; on parle aussi des traducteurs, ou des applications comme Photo Maths par exemple. Cependant, ChatGPT semble rester l’une de vos favorites.
Effectivement, nous avons effectué un sondage auprès de 71 personnes, comprenant une majorité de lycéens, mais tout de même quelques collégiens et parents, et il est ressorti que ChatGPT est une IA souvent utilisée par 83% des interrogés. Le bot est suivi de près par les traducteurs comme DeepL; et Photo Maths n’arrive qu’en troisième position !
Les interrogés semblent souvent utiliser l’IA pour les langues, pour 73% d’entre eux, pour les maths à 40%, mais aussi pour la philosophie, le français, ou l’histoire-géographie pour 30% des interrogés.
Et si l’IA peut paraître être un bon moyen pour les élèves de déléguer tout le travail à faire, ce n’est pas l’utilisation qui ressort le plus lorsque nous vous interrogeons. En effet, 80% des personnes interrogées utilisent l’IA pour lui poser une question spécifique, au lieu d’aller sur Internet; 66% l’utilisent pour expliquer des cours ou des concepts.
Quant à l’intensité d’utilisation de l’IA, les moyennes du sondage peuvent paraître surprenantes : 76% des personnes interrogées ont utilisé l’IA pour la dernière fois entre le jour de publication de notre sondage et la semaine précédente. Cependant, nous vous avons demandé à quelle intensité vous utilisiez l’IA, et celle-ci reste moyenne, pour 70% d’entre vous.
Et les professeurs alors ? Nous avons effectué un sondage auprès de 38 professeurs, afin de savoir comment l’IA pouvait affecter leur métier. Pour 34% d’entre eux, cela n’a pas tellement d’impact, puisqu’ils n’utilisent que très peu l’IA, voire même ne l’ont jamais utilisée. 52% des professeurs ont tout de même utilisé l’IA au moins une fois entre la date de parution de notre sondage, et le début du mois…
Mais comment les professeurs se servent-ils de l’IA ? 58% des interrogés s’en servent afin de proposer des exercices et des activités à leurs élèves, 45% s’en servent afin de poser une question spécifique (cette utilisation de l’IA est donc bien moins récurrente pour les professeurs que pour les élèves !), et presque 30% se servent de l’IA afin d’approfondir leur cours, de générer des images, ou bien de donner des idées d’exercice pour préparer des contrôles.
Et concernant la triche ? 37% des interrogés sont plutôt d’accord avec le fait que, tricher avec ChatGPT, c’est moralement pire que de tricher avec une antisèche. Mais alors, pour les professeurs, est-ce utile de tricher avec l’IA, ou bien fait-elle trop d’erreurs ? Ici, les interrogés sont assez divisés : ⅓ pensent que c’est inutile de tricher avec l’IA, ⅓ ne sont pas d’accord avec cette affirmation, et ⅓ sont plutôt neutres sur la question. Malgré cela, 43% des professeurs interrogés ne pensent pas qu’il est facile de faire la différence entre la copie d’un élève et celle d’un robot. Enfin, 45% des interrogés pensent qu’il serait absurde de priver les élèves de l’utilisation de l’IA, étant donné qu’ils y auront accès dans leur futur travail.
Enfin, question tout de même importante, nous avons demandé à la fois aux élèves et aux professeurs s’ils avaient peur de l’intelligence artificielle, et des changements qu’elle pourrait apporter dans le futur. Pour 72% des élèves interrogés, l’IA n’est pas intimidante, les professeurs semblent ne pas trop y prêter d’attention, pour la moitié des interrogés du moins. 35% des professeurs sont même enthousiastes, contre 17% des élèves ! Les personnes effrayées par l’IA, à différents degrés d’intensité (de la simple frayeur à la peur qu’elles nous fassent du mal), représentent environ un quart des élèves, ainsi qu’un quart des professeurs interrogés.

Faut-il être poli avec l'IA ?
La politesse avec l’IA est un débat qui semble animer de plus en plus d’élèves. Faut-il dire bonjour, merci, s’il te plaît à ChatGPT ? Ou faut-il aller droit au but, sans perdre de temps, et lui ordonner de faire une tâche ?
D’après notre sondage, 63% des interrogés sont polis avec l’IA. Mais cela a-t-il quelque chose à voir avec la pertinence de la réponse du bot ?
Certes, le prompt (ou le texte que l’on écrit pour formuler une requête) est très important, et va influer sur la réponse produite sur l’IA. En effet, si l’on précise que l’on est en terminale, en spécialité physique, la réponse à notre question ne va pas être la même que si l’on précise que l’on ne comprend rien à la physique et que notre requête s’inscrit dans le cadre de l’enseignement scientifique. La réponse de l’IA s’adapte aux précisions qu’on lui apporte; la rédaction du prompt a donc son importance. Cependant, la politesse est-elle nécessaire, et apporte-t-elle quelque chose à la réponse, mis à part des petits smileys dans la conclusion ? Eh bien, selon des articles de recherche, le fond reste le même quel que soit le ton employé, c’est simplement la forme qui change : lorsque l’on est poli, ou particulièrement agressif, les réponses semblent plus longues. Mais, selon ChatGPT lui-même, la politesse rend l’échange plus fluide, et celui-ci peut sembler plus plaisant pour le lecteur.
Ainsi, l’IA semble prendre une place croissante chez les élèves, car elle offre de nombreuses possibilités, mais pas forcément pour lui déléguer tout leur travail. De plus, il s’agit d’un outil avec lequel il semble nécessaire de se familiariser, au vu de la révolution technologique (mais pas que) qu’il représente.
Leeloo (T2) et Timothée (T4)
PS : Merci à ChatGPT pour le titre de cet article !