Un acteur, cinq plaidoiries, cinq moments de vérité. Crime contre l’humanité : procès Papon. Enlèvement d’enfant et homicide volontaire : le pull-over rouge. Avortement et droit des femmes : affaire Bobigny…
Des plaidoiries extraordinaires et pertinentes d’après les grandes plaidoiries des ténors du barreau de Matthieu Aron : « Quand les mots peuvent tout changer ».
Captivant, Richard Berry, en incarnant de brillants magistrats, perpétue la mémoire d’affaires judiciaires emblématiques et, dans une pièce ayant déjà séduit de véritables avocat·es tel·les Marie Albertini, réalise l’impossible : nous ne sommes plus au théâtre, nous sommes au prétoire ! Nous ne sommes plus les spectateur·trices, nous sommes les juré·es à convaincre… et nous l’avons été ! Pitié, compassion, surprise, colère face à l’injustice… Berry réaffirme son talent en nous faisant éprouver autant de sensations fortes, et par la justesse de son jeu, semble encore pouvoir changer les verdicts !
Un moment d’Histoire ? Oui ! Cette pièce lève le voile sur les travers de la société et nous donne à voir des procès aux répercussions capitales, puisque ayant abouti à des lois et changements fondamentaux du système judiciaire, comme la loi Veil en 1975 ou l’abolition de la peine de mort (1981), et à mieux comprendre notre justice actuelle. Elle rend également hommage à toutes les victimes de la Shoah à travers le Procès Papon, au cours duquel intervînt Arno Klarsfeld.
Une leçon de théâtre ! En tant qu’actrice amatrice, je n’ai pu qu’admirer le brio avec lequel Berry interprète ces cinq avocat·es. Maîtrisant parfaitement l’espace sur scène et sachant rebondir après chaque imprévu (comme le ronflement inopiné d’un spectateur !), il conquiert le public par sa seule présence. Il ne se contente pas de réciter ses répliques, il les vit ; et ses silences ne peuvent que mieux les renforcer. Toutefois, certaines tirades sont assez appuyées, mais compensent l’absence de tension dans le théâtre : l’audience n’est pas la même que dans une cour d’assise, là où se trouvent des enjeux décisifs.
Une autre vision du métier : Cette pièce m’a donné une autre vision du métier d’avocat·e, similaire en certains points à celui d’acteur·trice : le but recherché dans les deux cas est de convaincre son auditoire. Ce qui m’a semblé le plus dur est le cas de conscience, notamment lorsqu’il s’agit de plaider pour un meurtrier. En effet, l’avocat·e doit aller au-delà des préjugés et des apparences pour comprendre un·e coupable, afin de le/la défendre, montrant ainsi de solides connaissances en relations humaines et une large ouverture d’esprit ce qui, à mon goût, est impressionnant et a tendance à se perdre dans notre société.
Mais le procès m’ayant le plus marqué est celui concernant l’avortement car j’ai trouvé aberrant qu’une victime de viol, tombée enceinte contre sa volonté, puisse tout de même être traitée en coupable et condamnée !
« Le sang se lave avec les larmes et non avec le sang. Tant que la peine de mort existera, la nuit régnera sur la cour d’assise » Maître Paul Lombard
Pour qui ? | Des passionné·es d’histoire, de théâtre ou de droit (ou simplement des curieux·ses qui se demandent de quelle manière se déroule un plaidoyer). |
Avec qui ? | Qui vous voulez, mais quelqu’un·e d’intéressé·e, sinon vous aurez droit à des ronflements ! |
Où et quand ? | – Théâtre Libre (4 Boulevard de Strasbourg, 75010 Paris) du 27/10/2019 au 01/12/2019 – Carré Bellefeuille (60 Rue de le Belle Feuille, 92100 Boulogne Billancourt) à partir du 18/12/2019 – Espace René Fallet (29 bis Rue Jean Jaurès, 91560 Crosne) à partir du 09/01/2020 |
Prix ? | De 30€ à 75€… |
Les + | Un super acteur et une occasion unique de vivre d’historiques cas judiciaires (puisque jamais enregistrés) ! |
Les – | Cassez votre tirelire : le billet n’est pas donné. |
Par Ludivine Million, 1e1