Paradoxe
Image default
Musique et concerts

Taciturne de Dinos

S’il vous prend l’envie de saisir le monde entre vos mains, de vous rappeler qui vous étiez hier ou de savoir qui vous serez demain, le dernier album de Dinos vous aidera sûrement.
Jules Jomby, plus connu sous le nom de Dinos, est un rappeur de 26 ans originaire de La Courneuve. Après avoir sorti Imany en 2018, il revient sur scène avec ce tout nouveau projet composé de 15 titres.
L’adjectif « taciturne » désigne une personne qui ne parle que peu, gouvernée par l’emprise du silence.
Dans ce nouveau projet très personnel il y aborde les thèmes de l’amour, la mort, de sa vie au quartier, de la famille, de l’enfance, du monde, de l’astronomie ou encore de son rapport à autrui.

Selon moi, Taciturne est l’album révélation de cette année : Dinos est parvenu à lier des textes recherchés sur des mélodies entraînantes à sa voix puissante découpée par des instrus de tous registres.

Le projet débute par un titre mélancolique « XNXX » où l’artiste se remémore les souvenirs de ses temps passés :

« J’me rappelle du mal, j’me rappelle du bien
Mais j’me rappelle que tout va mieux quand j’me rappelle de rien »

S’ensuit le morceau « N’Tiekar » plus axé sur le rap pur mené par des allitérations et assonances à travers un rythme rapide :

« On saura jamais c’que ça fait de fuir, on saura jamais c’que ça fait d’avoir des parents qui s’aiment »
« Qu’le bon Dieu me pardonne, toutes les choses que j’m’étais promis d’jamais faire sur ma vie, j’les ai faites »

Dinos complète sa tracklist avec le titre « No love » featuring Marie Plassard. Le duo mélange une voix douce et enivrante à un timbre plus fort et imposant pour donner l’un des sons les plus aboutis de l’album. Les deux auteur·trices se répondent l’un·e à l’autre sur la notion d’un amour impossible :

« On f’ra la guerre d’vant les panneaux d’ma rue, on f’ra l’amour sur les anneaux d’saturne »

Le temps de faire ne pause dans ce projet, le titre « Adeola Interlude » lie une première partie sur les tréfonds de son passé à une seconde qui s’inscrit dans le présent :

« Chaque histoire a deux versions, celui qui raconte la première croit toujours avoir raison »

Arrive mon morceau préféré, « Arob@se » révélant le paroxysme du talent de Dinos : une mélodie glaçante d’efficacité, une prod’ s’interprétant comme un aller simple vers une destination inconnue où le rêve règne et un texte magistral relatant un amour indésiré :

« Mon plus gros mensonge c’est quand j’dis que ça ira
Ton sourire ensoleillé devient glacial
La tête en l’air, l’âme dans un vaisseau spatial »

Taciturne se poursuit avec le titre « Quand les cailleras prient » dans lequel Dinos évoque sa vie en cité :

« J’pensais qu’si j’avais d’l’argent, j’voudrais sauver l’monde
Maintenant qu’j’commence à en avoir, j’veux juste me sauver d’ce monde »

Et « Les garçons ne pleurent pas » où le rappeur se confie sur son passage à l’âge adulte :

« Les garçons n’pleure pas, maintenant j’suis un homme
Alors je leure, alors je pleure »

Le projet prend fin avec « Taciturne » featuring Dosseh, morceau dans lequel les deux artistes s’associent et se complètent sur une instru mélodieuse à la guitare :

« Tout c’qui est bon est illégal, alors j’commence à croire
Que si l’amour c’était si bien, ça s’rait interdit par la loi »

Dinos conclue un album plus que réussi logiquement pas « Au-revoir » :

« Les soirées détruisent mes journées »

En dévalant les ruelles de votre quartier ou bien en vous perdant dans celui qui n’est pas le vôtre, pour vous réchauffer d’une journée glaciale de l’hiver interminable ou bien simplement à la lueur d’un espoir naissant de liberté, laissez-vous tenter par ce projet.

Cet album est incontestablement mon coup de cœur rap 2019 : l’artiste de 26 ans, l’un des futurs cadors de ce milieu, m’a ébloui d’une écriture et d’un style comme il s’en font peu, et ce en variant ses registres. Taciturne prendra encore plus d’ampleur au fil du temps et le monde pourra davantage se rendre compte qu’au final, Dinos avait beaucoup à nous dire.

Pour qui ?N’importe quel·le amateur·trice de musique et en particulier de rap.
Les +Tous les morceaux dont j’ai parlé, les paroles, les mélodies, les instrus…
Les –Certains titres sont selon moi trop décalés, comme « Wouuh » ou « Frank Ocean »
La note4,5/5P

Par Augustin Lassaussois (TS2)

En lien...

Joséphine Baker, qui était-elle vraiment ?

PARADOXE

Soul (2020)

PARADOXE

AMINA de Lomepal

PARADOXE