Damien Jenner, sa passion, son métier
Damien Jenner est un marin, ou plus précisément un skipper. Il sillonne les mers à bord de voiliers, et participe à des courses renommées. Paradoxe a eu la chance de pouvoir l’interviewer et d’échanger avec lui sur son parcours et ses expériences. Lors d’un article précédent, nous avons évoqué la relation singulière entre l’ENC et Damien Jenner lors de sa récente participation à la Transat Jacques Vabre. Découvrez-en maintenant plus sur cet homme hors du commun, sa passion, et son métier.
Une passion de longue date...
De quand date votre passion pour la voile ? À quel âge avez-vous commencé ce sport ?
J’étais vraiment tout petit, je devais avoir 2-3 ans à peine. J’ai eu la chance de naître au bord de la mer, mon père a toujours eu des bateaux, son père avant lui aussi, donc j’ai très vite navigué sur le bateau familial, puis en course. C’est un virus, et j’ai eu la chance d’être contaminé quand j’étais vraiment tout petit.
Jeune, j’ai beaucoup navigué en équipage, et j’ai eu l’occasion d’être champion de France quand j’avais une vingtaine d’années.
Avez-vous une région de prédilection pour naviguer ?
Oui, j’aime beaucoup la Bretagne sud, du côté du Morbihan et du Finistère. D’abord parce que ce sont des paysages magnifiques ; et puis parce que même si la mer est un peu dure parfois, j’aime bien les conditions assez musclées, donc cela me correspond parfaitement.
Et quel type de bateaux préférez-vous?
J’ai d’abord navigué en équipage, puis j’ai fait de la course au large dans des bateaux de 8 à 9 m qui traversaient l’Atlantique. Enfin, plus récemment, j’ai piloté des CLASS40, pour évoluer, je pense, vers les IMOCA.
Les CLASS40 ont cet avantage d’être à la fois extrêmement maniables et extrêmement puissants, extrêmement rapides. Je dois avouer que je suis complètement tombé amoureux de cette classe et de ce design de bateaux. Je n’ai pas eu encore beaucoup d’opportunités de naviguer en IMOCA, mais c’est vrai que pour l’instant je trouve les CLASS40 assez incroyables. On a du mal à passer à un bateau moins performant…
… Que Damien Jenner prend plaisir à transmettre
Est-ce que vous enseignez votre savoir à des jeunes; est-ce que vous transmettez vos compétences et votre passion ?
Absolument. Déjà à mes enfants, mais c’était aussi tout le but de mon initiative : transmettre. C’est pour cela que j’ai voulu intervenir à l’ENC. Et puis les qualités développées grâce à la voile se retrouvent aussi dans la vie de tous les jours. La vie, en mer comme sur terre, n’est pas facile, il y a toujours des moments compliqués. On apprend à être résistant, il faut savoir s’adapter donc savoir un petit peu tout faire, et être humble.
Ensuite, concernant la navigation en elle-même, oui je transmets au maximum à des personnes qui veulent faire des transats ou monter des projets comme ça, je le fais bien volontiers. C’est quelque chose que j’aime beaucoup, surtout que maintenant c’est à moi de passer le relai, et ça fait en quelque sorte partie des obligations que l’on a.
Vivre de sa passion : le métier de Damien Jenner
Skipper, est-ce votre seul métier, ou faites-vous autre chose en dehors des courses?
J’ai ma propre entreprise. J’ai la chance d’être entrepreneur donc j’ai pu monter ma société avec deux autres associés qui me permettent d’avoir le temps nécessaire pour pratiquer mon sport. Ainsi, même si la voile prend beaucoup de mon temps (environ 50% de mon temps pendant les phases de préparation), cela me permet, les autres 50%, de développer mon business. Mais être skipper est un métier à part entière, en tout cas à un niveau élevé.
Le métier de skipper
Un skipper passe bien entendu du temps sur l’eau, à bord d’un bateau, mais pas seulement. La préparation des courses fait aussi entièrement partie du métier.
Pourriez-vous nous expliquer en quoi consiste la phase de préparation d’une course ?
La phase de préparation est très longue, elle peut durer plusieurs années pour pouvoir être sur la ligne de départ, prêt à courir. Elle est divisée en trois grandes parties. Il faut créer une société, chercher des sponsors, parfois il y a des employés, des prestataires que l’on doit payer, donc la vie d’une entreprise finalement, et son financement. Il y a aussi une partie communication, qui consiste à communiquer autour d’un message, monter des vidéos, intervenir dans des entreprises, des écoles (comme l’ENC) et s’occuper des sponsors et des partenaires. C’est une partie non négligeable, surtout quand on court pour une cause. Et enfin il y a une partie entraînement sportif et préparation technique des bateaux. Si je devais donner une répartition, ce serait presque ⅓ ⅓ ⅓. Mais finalement, la partie navigation pure n’est pas si importante que ça à l’échelle de 2 ans de projet.
En quoi consiste votre entraînement physique pendant cette phase de préparation?
Il faut de l’endurance, donc la natation, la course à pied, le cyclisme sont des bons sports pour la travailler. Il faut aussi un peu de musculation pour pouvoir être tonique; se lever à 3h du matin, au beau milieu d’une tempête et être assez puissant. Il y a aussi une préparation mentale pour être capable de gérer le stress. Elle inclut de la sophrologie, pour apprendre à gérer sa respiration et son niveau d’angoisse (parce qu’il y en a souvent !). On apprend des techniques de respiration et de gestion des muscles internes, par exemple.
Manon Villoutreix (partie vers le supérieur) et Anastasia Kunetz (P2)
