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La rédac' Articles de fond

Le sondage, un support pour la démocratie ?

Le 10 octobre dernier, le journaliste Guillaume Daret expliquait, sur le plateau du 20 Heures, que « 193 sondages ont été commandés en 2002. Dès 2012, ça va bondir, 409 sondages, puis 560 en 2017, quasiment trois fois plus en quinze ans. Le record sera probablement battu cette année. » Ces sondages doivent-ils faire la légitimité d’une candidature, d’une réforme ou d’un produit ? 

● Petite Histoire du sondage d’opinion 

Le sondage d’opinion connaît une croissance intimement liée à celle des médias. Avec l’explosion des médias durant l’après-guerre, les journalistes souhaitent comprendre au mieux les populations, par le biais des sondages. George Horace Gallup (1901-1984) est considéré comme le père fondateur des sondages, avec son analyse des élections américaines de 1936 où il prédit, avec succès, la réélection de F. Roosevelt. 

En France, c’est en 1938 qu’est produit le premier sondage qui porte sur les accords de Munich, mais c’est surtout durant les Trente Glorieuses que l’opinion publique parvient à s’imposer comme incontournable aux yeux de tous. 

Depuis peu, de nouveaux acteurs sont venus concurrencer le sondage comme mode de recueil de l’opinion publique. Il s’agit d’entreprises qui se proposent de traiter directement les « opinions » sur le web, en analysant directement les millions de données disponibles en ligne, au lieu de questionner les individus. 

● Le sondage, un outil simple et efficace 

Le sondage est la méthode par excellence pour recueillir des données auprès d’une population de grande taille. Essayez donc d’interroger 1000 personnes à l’aide d’un autre moyen… pas simple ! 

Les résultats ainsi recueillis peuvent faire l’objet d’analyses poussées et conduire à observer des différences statistiquement significatives, ce qui est impossible avec des petits groupes. 

En outre, le sondage peut se faire à distance et offre plusieurs possibilités (nombre de questions, formulation des énoncés, mode de collecte…) et usages possibles (sociologie, politique, communication etc.). L’avantage (et

inconvénient !) de ces sondages, c’est qu’ils sont relus et corrigés afin d’être au plus près de la réalité, car on sait qu’une part non négligeable des interviewés ment. 

Par exemple, quand on interroge les Français sur leurs votes passés et qu’on compare leurs réponses aux résultats réels des élections précédentes, on remarque des décalages, parfois très importants. Ainsi, en 2002, à les en croire, Lionel Jospin était qualifié pour le second tour des présidentielles. 

● Voilà pourquoi prendre du recul devant les chiffres… 

Les sondages sont vecteurs d’information, et donc de libertés, mais sont pourtant régulièrement critiqués par certains journalistes… 

Les critiques des sondages d’opinion sont anciennes : dès 1943 Jean Stoetzel rédige une thèse mettant en garde contre le caractère parfois dangereux et abusif de l’enquête d’opinion. En effet, celle-ci porte souvent sur des éléments éphémères, vagues ou incompréhensifs et traités par des enquêteurs dont la neutralité n’est pas toujours assurée. 

L’usage fréquent des sondages peut perturber l’opinion et créer chez les électeurs les plus indécis des mouvements d’adhésion ou de rejet fondés sur l’idée que l’élection est jouée. L’effet bandwagon explique qu’une fraction non négligeable des indécis est particulièrement sensible aux choix déjà effectués par d’autres et se décide, inconsciemment, de “choisir la victoire”, c’est-à-dire voter pour le favori afin d’être satisfait du résultat du vote. 

De plus, les résultats des sondages doivent être mis en perspective et interprétés intelligemment, ce qui n’est pas toujours le cas. Or, ces sondages sont des outils pour les hommes politiques et ne doivent donc pas être biaisés. 

Serait-il intéressant de proposer une loi qui interdirait la publication des sondages avant les élections ? Interdire les sondages, serait pratiquement irréalisable. Car si on interdit les journaux d’en publier dans leurs pages, ils pourraient toujours le faire sur internet. Mais on pourrait néanmoins imaginer qu’une commission soit créée pour veiller à la bonne utilisation des sondages. 

Ainsi, le sondage d’opinion est un outil utile, pouvant s’avérer dangereux, pour notre démocratie. Il est donc important que les citoyens s’informent au mieux, en vérifiant et variant leurs sources, et en prenant du recul par rapport aux résultats annoncés. En effet, en France, depuis 2010, le taux d’erreur moyen des intentions de vote est de l’ordre de 2%, un chiffre faible mais suffisant pour annoncer le mauvais candidat.

● Petites infos pour la présidentielle à venir : 

Les derniers sondages en date considèrent que les deux seconds tours les plus probables sont l’hypothèse Macron-Le Pen et l’hypothèse Macron-Zemmour (aucun des deux n’étant, pour l’instant, officiellement candidat !). Néanmoins, Bruno Cautrès, chercheur au CNRS, rappelle, à France Info, qu’il “faut rester prudent sur un écart de 2 ou 3 points entre deux candidats. Quand [il] voit Marine Le Pen à 16% et Eric Zemmour à 17%, pour [lui], ils sont à égalité compte tenu de la marge d’erreur »

Comme à toutes les élections depuis 1973, il est interdit de publier un sondage moins de deux jours avant l’élection. 

Pour être candidat, il faut être majeur, jouir de ses droits civils et politiques et n’être dans aucun cas d’inéligibilité prévu par la loi. Il faut également réunir 500 signatures d’élus nationaux ou locaux d’au moins 30 départements différents, sans dépasser un dixième, soit 50 pour un même département ou une même collectivité. 

Les principaux instituts de sondage, en France, sont OpinionWay, Harris-Interactive, l’Ifop ainsi qu’ Ipsos. 

J’espère que cet article vous a plu, 

Jacques de Thieulloy 1er 4

illustration libre de droit

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