1917. Deux ans depuis que le front de l’Ouest s’est enterré dans les tranchées, un an après la bataille de la Somme durant laquelle 200 000 soldats britanniques et 60 000 soldats français ont donné leur vie. Tom Blake, un jeune caporal anglais, se voit confier par son état major une mission de première importance : prévenir un régiment allié du piège qui l’attend lors de l’assaut du lendemain, et ainsi sauver 1600 vies dont celle de son frère. Accompagné par son ami Will Schofield, jeune vétéran de la Somme, il va devoir se frayer un chemin à travers le territoire allemand, faisant défiler sous nos yeux les horreurs de la Première Guerre mondiale.
Le simple fait pour un film à gros budget d’aborder cette période de l’histoire est déjà original en soi, au vu du faible nombre de long-métrages traitant de ce conflit d’une importance pourtant capitale. Ce n’est cependant pas l’argument de vente principal de ce film, ce qui le rend si original et si immersif. En effet, le réalisateur Sam Mendes (ayant notamment réalisé Skyfall) l’avait dit depuis le début : ce film serait un plan séquence du début à la fin, sans aucune coupure de caméra (à l’exception d’une seule vers le milieu de film, totalement justifiée par le scénario). Ici, il n’est pas question de porter un regard externe sur le conflit à grande échelle, ni sur une longue période. L’assistance suit en temps réel les pérégrinations des protagonistes et voit la guerre comme ils la voient ; le film est une simple journée au milieu d’une guerre infiniment plus complexe et plus large. Il est difficile d’expliquer à quel point ce procédé est immersif, et je vous invite vivement à regarder sur YouTube le court making-of qui explique les moyens mis en œuvre pour réaliser cette prouesse technique (https://www.youtube.com/watch?v=NT4ow7_HNqw).
Cette touche d’originalité, à laquelle s’ajoutent les nombreuses autres qualités du film que j’aborderai juste après, lui ont notamment valu le Golden Globe du meilleur réalisateur et celui du meilleur film dramatique, ainsi que de nombreuses nominations aux Oscars 2020.
Et dire que ces récompenses sont méritées est la moindre des choses. Durant deux heures, on suit ces soldats lors d’un voyage rythmé par une musique à l’image de leurs émotions : parfois stressante et épique, parfois tragique et mélancolique. Tout semble calculé pour nous faire croire qu’on parcourt les tranchées à leurs côtés, jusqu’aux bruitages des coups de feu ou des moteurs d’avion dont la puissance nous porte à croire qu’ils sont bien réels. L’aspect photographique est également très travaillé, certaines scènes arrivant à habilement jouer des couleurs et des lumières pour donner une forme de poésie qui contraste avec la brutalité de la situation.
Mais 1917 ne se contente pas de raconter une histoire, il raconte aussi l’Histoire avec un grand “H”. Tout au long du récit, de nombreux aspects de la Grande Guerre sont abordés, souvent subtilement, mais assez pour nous rafraîchir la mémoire. On aperçoit les conditions d’hygiène des tranchées, la gestion des blessé·es après le combat, la vie civile au milieu des combats, la dévastation des villages français, les combats aériens, ou encore le moment fatidique de l’assaut. Attention toutefois aux âmes sensibles, car si le film a pour but de montrer le quotidien des soldats au front avec un grand réalisme, il a bien l’intention de tout montrer. Attendez-vous donc à voir des corps en décomposition à moitié enterrés et grignotés par les rats ou encore des dizaines d’hommes et de femmes aux membres arrachés gémissant sur leur lit de fortune en attendant une mort certaine, et cela de manière non édulcorée.
Pour finir, je ne peux que vous conseiller d’aller voir 1917 au cinéma afin de vous faire votre avis sur ce film qui risque bien de devenir, sinon un classique, au moins une oeuvre de référence sur cette guerre dont on entend si souvent parler mais que l’on a rarement l’occasion de voir sur nos écrans.
Acteurs notables | Dean-Charles Chapman, George McKay, Benedict Cumberbatch. |
Pour qui ? | Toute personne intéressée par l’histoire ou friande d’une expérience cinématographique unique (attention aux âmes sensibles cependant). |
Avec qui ? | Peu importe. |
Les + | L’immersion bluffante servie par le plan séquence, le sound design excellent ou encore la musique. |
Les – | Un scénario simple, celui-ci n’étant pas l’ambition principale du film. |
Par Guillaume Fulconis, TS1